lundi 19 novembre 2018

Le gibet de Creuë - Vigneulles-lès-Hattonchâtel

Un vulgaire tas de pierres ?
Non ! Une découverte archéologique exceptionnelle !

Au lieu-dit Meussaumont, à Creuë sur la commune de Vigneulles-lès-Hattonchâtel en Meuse, en cinq années de recherches archéologiques, un tas de pierres intrigant est devenu un vestige important de l'histoire du village. L'association APM (Archéologie et Paysages en Meuse) interpellée par un agent de l'ONF a en effet découvert là, un site relativement bien préservé de Haute Justice en Lorraine.

Les textes nous informent que le seigneur de Creuë en 1583, Jean du Châtelet possède basse, moyenne et haute justice. La carte de Cassini élaborée sous Louis XV confirme la présence de fourches patibulaires sur les hauteurs du village. 

Le site présente 3 éléments :

Plan topographique du site - Denis Mellinger - APM


Une structure en pierre sèche d'un mètre de haut et 6,20 m de long. On y accède par 3 marches. Une fosse est présente sous cette structure. Il s'agit certainement du socle supportant les fourches patibulaires pour les pendaisons.





Non loin de là au sud a été retrouvée une colonne en pierre d'environ 1,20 m de hauteur. La base carrée est séparée de la colonne par une moulure. Cette colonne présente à 10 centimètre de son sommet un trou servant d'attache à un collier métallique. Cette colonne antique est un réemploi et a sans doute servi de carcan pour les condamnés à de plus petites peines.

Colonne carcan

Base du carcan



L'élément le plus intrigant est le cabaret. C'est un cercle de 16 mètres de diamètre délimité par un fossé toujours existant qui permettait à la population d'assister au "spectacle" tout en étant clairement isolé du lieu par le fossé. En effet, à cette époque, les gibets sont placés en hauteur à la vue de tous, souvent à la croisée de chemins pour montrer à la population où mène le crime.

Fossé délimitant le cabaret
Cabaret du gibet de Creuë


Les fouilles ont permis de démontrer que le site a été utilisé certainement jusqu'à la Révolution Française. Elles ont également permis de découvrir une girouette en fer blanc représentant une chimère et pouvant dater de la fin du XVIIème siècle. Aucun élément ne permet à ce jour de dire si c'était éventuellement un élément du gibet.

la girouette (copyright : l'Est Républicain)


Actuellement, le site est plutôt anonyme, mais un projet de panneau explicatif permettra au promeneur de mieux comprendre les lieux, car quiconque passe ici ne remarque absolument pas le fossé et ne comprend pas ce que peut être ce tas de caillou.
Reste également à trouver dans les archives des traces de procès pouvant attester que le gibet de Creuë ait servi. Trois siècles d'archives sont à étudier : avis aux amateurs !

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter l'article publié à l'issue de la Journée Archéologique de Lorraine du 4 octobre 2015, même si 3 ans d'études ont complété ce premier exposé.

Outre ce trésor archéologique le village de Creuë possède également une église médiévale  intéressante de part ses sculptures énigmatiques, sa peinture murale du XVIème siècle et les fresques de Duilio Donzelli.  

samedi 3 mars 2018

Abbaye de l'Etanche

"C'est un coin de verdure où chante une rivière" _ Arthur Rimbault
C'est là que se trouvent les ruines de l'abbaye Notre-Dame de l'Etanche, quelque part au centre est de la Meuse près de Deuxnouds-aux-bois sur la commune de Lamorville.

Fondée par l'Abbé Philippe de Belval en 1144, l'abbaye prémontrée est d'abord un monastère double. Elle possède également une dépendance : le prieuré de Benoîte-Vaux qui fut un haut lieu de pèlerinage. Malheureusement, il ne reste rien de cette abbaye du XIIème siècle détruite  au XVIIème siècle pendant la Guerre de 30 ans par les Suédois. Elle est reconstruite un siècle plus tard et comporte 9 cellules. L'église est alors consacrée en 1770, mais la Révolution Française signe la fin de sa vocation religieuse. Les bâtiments sont confisqués comme biens nationaux, vendus et transformés en ferme au XIXème siècle.La première Guerre Mondiale fut elle aussi fatale à l'abbaye en l'incendiant. Cependant, jusque dans les années 1980, les bâtiments furent habités par des exploitants agricoles. Suite à un différend entre propriétaire et locataire, le lieu est laissé à l'abandon et se dégrade petit à petit, les vandales aidant le temps. Il faut attendre 2016 pour que l'association des Amis de l'Abbaye de l'Etanche prenne le destin de l'abbaye en main. Gestionnaire du site, le Conservatoire d'Espaces Naturels de Lorraine leur confie l'abbaye pour envisager la restauration du bâti.

Malgré son état de délabrement, dont on mesure malgré tout l'amélioration depuis que l'association s'en occupe, le site ne manque pas de charme. L'idéal est de découvrir le site à pied, en partant du village de Deuxnouds-aux-Bois ou de Creuë ou même d'Hattonchâtel. L'abbaye se dévoile au fond d'un vallon boisé et révèle peu à peu son architecture.

En arrivant de Creuë ou Hattonchâtel



L'abbaye se compose de deux parties : la chapelle et le bâtiment conventuel sur 2 niveaux plus les combles en forme de L. L'architecture est simple avec de grandes ouvertures. Les décorations baroques sont réservées à la chapelle. Elle arbore une façade monumentale en 3 niveaux. Le portail s'insère dans une grande baie en plein cintre et est surmonté d'un décor malheureusement mutilé. Un fronton en demi-lune occupe le deuxième niveau, son décor révèle un personnage féminin (la Vierge ?) au centre de volutes. Ce fronton est surmonté par un clocheton avec une grande baie en plein cintre. Il est encadré de pots-à-feu dont un seul subsiste.

Façade extérieure du bâtiment conventuel

Côté cour

Chevet de la chapelle

Chapelle

Façade de la chapelle

Décor du portail

Fronton et clocheton


Afin de préserver ce patrimoine oublié, inscrit aux Monuments Historiques en 1984, n'hésitez-pas à aider l'association. Une souscription a été ouverte grâce à la Fondation du Patrimoine. Vous pouvez également participer à la riche programmation de l'association, ce qui vous permettra également de découvrir les lieux par vous-même, si vous êtes dans le secteur.